Chers adhérents et amis de la Catalogne,
Les juges1poursuivent sans vergogne leur guerre contre l’indépendantisme et, au-delà, contre la Catalogne qu’ils veulent écraser tout comme l’avait fait en 17142l’idéologie de leurs aïeux. Le Parti populaire (PP) se bat pour discréditer le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), actuellement au gouvernement, le regard rivé vers les prochaines élections, tout d’abord en Galice (le 18 février) puis au Parlement européen, en juin prochain. Vox ne cède en rien au PP ni aux juges dans la guerre contre l’amnistie, contre l’indépendantisme et contre tout ce qui a une odeur à catalan, mais également contre le gouvernement socialiste que les deux partis voudraient faire tomber à cause de l’accord que celui-ci a signé avec les partis indépendantistes. Au Principat3, le Parti socialiste de Catalogne (PSC) attend son tour, Junts per Catalunya (Junts) et Esquerra republicana de Catalunya (ERC) se battent pour le pouvoir et les indépendantistes anonymes continuent d’être favorables à l’indépendance dans les sondages effectués de temps en temps. Mais tout cela n’est que la pointe de l’iceberg, celui du panorama politique actuel, avant-coureur d’une année intense et annonciateur d’assauts juridiques violents.
Dans ce contexte politique, l’Assemblea Nacional Catalana (ANC), clairement opposée au pactisme affiché par ERC et Junts, a déjà mis en marche la liste civique, comme nous l’avions annoncé dans la lettre de décembre 2023. Pour l’instant, des réunions d’information sont organisées sur cette liste civique et sur l’objectif qui est le sien, c’est-à-dire la création d’un groupement d’électeurs qui se présenterait aux prochaines élections au Parlement de Catalogne afin de mettre en œuvre l’indépendance. Cette initiative, cependant, ne recueille pas l’assentiment général. Environ 130 personnes ont signé et publié un manifeste dans lequel elles
1La justice, en général, fonctionne correctement. C ’est la direction de la justice, imprégnée d ’idéologie franquiste qui n ’a pas effectué sa transition vers la démocratie.
2La guerre de succession d’Espagne qui se termine en 1714 par l’interdiction pour les Catalans de leurs institutions et de leur langue, est une guerre pour le pouvoir et le contrôle de l’Europe. Pour en savoir plus, voir le document édité par la Generalitat « Catalogne, 1714. Voyage sur les lieux de la guerre de succession et à l’époque baroque » :
https://empresa.gencat.cat/web/.content/20_-_turisme/publicacions/documents/arxius/Catalunya-1714_fr.pdf 3 La principauté de Catalogne était un État du bas Moyen Âge et de l’Époque moderne, sous l’autorité des Corts Catalanes (le Parlement), créé à partir du XIIesiècle par l’union des comtés catalans dont le souverain est Alphonse II d’Aragon et 1er de Barcelone. Même sans être formellement un royaume, la principauté était juridiquement et institutionnellement sur un pied d’égalité avec le reste des États qui composaient la couronne d’Aragon. Actuellement est synonyme de ‘Catalunya’.
exposent leurs divergences. Elles dénoncent le fait que la proposition ne respecte pas les statuts et que le projet ne soit pas transversal. Toutefois, elles défendent l’option d’une « liste unitaire avec l’ensemble du mouvement indépendantiste ». Vous trouverez le manifeste inclus dans l’article suivant :
https://www.vilaweb.cat/noticies/lluis-llach-blanca-serra-i-mes-dun-centenar-de-carrecs-i-ex carrecs-de-lanc-critiquen-la-proposta-de-llista-civica/
Ainsi que l’article « Une erreur grave de l’ANC : s’impliquer dans une candidature électorale » de Carles Castellanos, militant indépendantiste historique, membre de l’ANC, militant de Poble Lliure4et professeur de l’Université autonome de Barcelone (UAB), publié sur Llibertat.cat. Voici le lien :
https://www.llibertat.cat/2024/02/un-error-greu-de-l-anc-embolicar-se-en-una-candidatura electoral-56094
Concernant les réunions d’information pour les adhérents de l’extérieur, nous vous communiquerons, dès que nous les aurons, les dates qui seront forcément en février puisque, entre le 1er et le 14 mars, nous, les membres de l’association, pourrons décider si nous voulons pousser en avant ce projet.
Pour en savoir plus, cliquez sur la page web dédiée de l’ANC :
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Ainsi donc il n’y aura pas d’amnistie. Pour l’instant. Après un long mois de discussions, de débats, d’amendements et de doutes, Junts a voté contre le projet de loi (30.01.24). La rédaction du projet de loi laissait trop de brèches par où les juges auraient pu s’engouffrer et transformer la loi en un texte sans valeur. En conséquence, nombre de personnes mises en cause n’auraient pu bénéficier de cette loi, voire même ce texte aurait pu servir à mettre en examen encore davantage d’indépendantistes, comme l’explique Gonzalo Boye (l’avocat en charge de la défense du président Carles Puigdemont et de Toni Comín, en particulier) dans cet entretien publié par le journal en ligne Vilaweb :
https://www.vilaweb.cat/noticies/entrevista-gonzalo-boye-amnistia-terrorisme/
Cela ne veut pas dire que la loi ne verra pas le jour, cela veut dire, simplement, que le texte doit retourner à la commission de la Justice du Congreso de los diputados, en nouvelle lecture. Les députés de la commission ont maintenant quinze jours pour délibérer, élaborer une nouvelle rédaction et la proposer au Congreso réuni en séance plénière ; puis les députés disposeront eux aussi de quinze jours pour débattre sur la nouvelle rédaction du projet de loi et, en fin de compte, procéder à un nouveau vote sur le texte amendé issu de leurs débats. Comme le 30 janvier
4‘Poble lliure’ est un parti politique de gauche faisant partie de la Candidature d’unité Populaire (CUP), une coalition indépendantiste « assembléiste » classée entre la gauche et l’extrême gauche.
dernier, le projet de loi devra obtenir la majorité absolue des votes pour être adopté et suivre la navette parlementaire au Sénat. Le refus inattendu de Junts a déconcerté l’ensemble des partis et a, en particulier, rendu furieux ERC et Pedro Sánchez. Le refus de Junts, a toutefois permis de gagner un mois pour continuer à négocier avec le PSOE et tenter de renforcer le projet de la loi contre les manœuvres judiciaires d’une part du juge García Castellón en charge des cas du Tsunami Democràtic5et de celui des Comités de défense de la République (CDR) et, d’autre part, du juge Aguirre en charge du cas Vólkhov. Une douzaine de membres des CDR sont accusés d’appartenir à une organisation terroriste ainsi que de détention, de recel et de fabrication de substances ou d’appareils explosifs ou inflammables ou de leurs composants à caractère terroriste.
Si, à l’issue de cette procédure qui ouvre un délai supplémentaire aux discussions, le projet de loi n’était pas adopté, il serait définitivement rejeté. Dans ce cas, la survie de la législature pourrait être remise en question et une nouvelle phase politique pourrait s’ouvrir avec de nouvelles élections.
En résumé, ou bien le PSOE cède et retire la mention de terrorisme avec les conséquences que cela aura nécessairement dans ses relations avec le PP et, également, au sein du PSOE lui même, ou Junts accepte de voter un texte qui en exclura un nombre inimaginable de personnes laissant le mot d’amnistie vide de sens, ou, troisième option, il est mis fin à la législature. Ils ont un mois.
Concrètement, le PSOE avait, dans son exposé des motifs initial, exclu de l’amnistie les délits de terrorisme et de haute trahison. Or, plusieurs semaines avant que le PSOE ne présente son projet de loi, le juge García Castellón s’était débrouillé pour conserver le contrôle de la cause contre le Tsunami Democràtic. Cela s’est passé en octobre 20236à la suite de quoi le procureur Miguel Ángel Carballo, changeant de tactique7, s’était opposé à l’accusation de terrorisme et avait défendu la thèse des désordres publics. Afin de contrecarrer la position du procureur antiterroriste, le juge avait accepté ou peut-être même poussé Vox et l’organisation d’ultra
droite Dignidad i justicia à se constituer partie civile dans la cause contre le Tsunami Democràtic. Et c’est ainsi que, avec l’aide de l’extrême-droite, le juge García Castellón a pu maintenir l’accusation de terrorisme contre le Tsunami Democràtic et donc le contrôle de la cause à l’Audiencia nacional8.
Mais cela, Junts et ERC le savaient. Ils ont néanmoins accepté la rédaction socialiste. Pourquoi ? Josep Casulleras, lors de la Terturlia proscrita du 1er février affirmait « Pedro Sánchez a finalement été investi sans que le problème de l’insertion de la référence au terrorisme ait été résolu. En même temps, le projet de loi était présenté au Congreso. De sorte
5 Le Tsunami democràtic était une plateforme de messagerie instantanée qui avait organisé différents actes de résistance pacifique en 2019 pour protester contre les sentences condamnant les dirigeants politiques à des peines de prison exorbitantes. L’acte ayant eu le retentissement le plus grand a été le blocage du terminal 1 de l’aéroport de Barcelone.
6 Dans l’émission La Terturlia proscrita, il a été souligné que cette opération avait eu lieu en septembre 2023. 7 Quatre jours avant les élections du 23 juillet, il avait soutenu le caractère terroriste du Tsunami Democràtic 8L’Audiencia nacional est un tribunal d’exception hérité du franquisme. Il a été créé le 4 janvier 1977 pour remplacer le Tribunal d’ordre public, les compétences de l’un étant passées à l’autre. Il est compétent dans les crimes graves et les affaires ayant une importance nationale, voire internationale, comme par exemple le terrorisme, le crime organisé ou le trafic de drogue.
que je crois que c’est cela le péché originel, celui qui fait que maintenant il soit si compliqué de faire machine arrière ».
Vous pouvez écouter La Tertulia proscrita du 1er février dont le sujet était « Toutes les clefs pour comprendre le non de Junts au projet de loi d’amnistie » en cliquant sur le lien suivant :
https://www.vilaweb.cat/podcast/tertulia-proscrita-no-junts-llei-amnistia/
Un peu plus tard, au début du mois de novembre, au moment-même où Junts s’apprêtait à annoncer son accord sur le texte du projet de loi d’amnistie proposé par le PSOE, le magistrat García Castellón avait fait savoir qu’il avait décidé d’ouvrir une information judiciaire pour terrorisme à l’encontre de Carles Puigdemont et de Marta Rovira. La publication de cette décision avait contraint Junts à ajourner de deux ou trois jours l’annonce de son accord avec le PSOE de manière à pouvoir analyser l’incidence que la décision du juge pourrait avoir dans le contexte politique.
Autrement dit, le juge García Castellón a tout d’abord commencé par manœuvrer pour maintenir la cause du Tsunami Democratic à l’Audiencia nacional, puis il a décidé d’ouvrir une information judiciaire à l’encontre de Carles Puigdemont et de Marta Rovira, à la recherche d’indices et de liens pouvant les impliquer, de manière surréaliste, dans un délit de terrorisme et, parallèlement, le juge Joaquín Aguirre a réactivé le cas Vólkhov accusant Carles Puigdemont et d’autres personnes de son entourage de haute trahison.
Le cas Vólkhov avait surgi en 2017. A ce moment-là, de hauts dirigeants de l’indépendantisme avaient été accusés de s’être associés avec la Russie afin d’obtenir une aide économique et militaire de ce pays dans le processus d’indépendance de la Catalogne. L’objectif de la Russie, d’après le juge Aguirre, était de déstabiliser l’État espagnol. A l’heure actuelle, sept ans après, très précisément la veille du vote du texte sur l’amnistie, le juge Aguirre réactive le cas et maintient cette accusation. Il affirme, en outre, que l’intention de Poutine était d’utiliser la Catalogne comme un cheval de Troie pour déstabiliser l’Europe et menacer les valeurs et les principes de l’Union européenne.
Pour plus d’information, lisez l’article du journal en ligne Vilaweb « Le juge Aguirre révèle à la télévision allemande des détails du scénario russe dans le cas Vólkhov ». Cet article (en catalan) analyse la participation de Joaquín Aguirre au programme Taggeschau de la télévision allemande (la vidéo insérée dans l’article est en allemand) :
https://www.vilaweb.cat/noticies/video-jutge-aguirre-comenta-detalls-cas-volkhov-televisio alemanya/
Les interventions de ces deux juges, totalement inacceptables d’un point de vue juridique, à des moments parfaitement calculés, démontrent qu’il y a une intention délibérée et préméditée de faire exploser l’amnistie. La prévarication dont ils font l’étalage et le mépris qu’ils manifestent pour le Parlement donnent la mesure de leur arrogance et de ce qu’ils sont prêts à faire pour empêcher l’amnistie et dynamiter l’indépendantisme.
Pour en savoir plus, lisez l’article « Une loi « bien utilisée » par les tribunaux ? » de Josep Cruanyes9publié sur le journal en ligne Vilaweb :
https://www.vilaweb.cat/noticies/llei-amnistia-ben-utilitzada-tribunals-opinio-josep-cruanyes/
Pedro Sánchez doit maintenant respecter les promesses faites afin de pouvoir être reconduit dans ses fonctions de président du gouvernement espagnol. Il savait que le PP et Vox sortiraient l’artillerie lourde. Dans ce sens, et bien que cela n’ait pas été son objectif, loin de là, le refus de Junts donne la « victoire », dans ce premier round, à la droite et à l’extrême-droite : le projet de loi n’a pas été voté. Ce mois de février sera décisif.
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Pour ce qui est de la langue, de plus en plus de cas d’intransigeance espagnoliste sont dénoncés dans nombre de situations de la vie quotidienne, comme par exemple dans le domaine de la santé.
Quant à l’officialité de notre langue dans les instances européennes ce n’est pas pour tout de suite. Pour commencer, la question n’a pas été débattue, le 29 janvier dernier, lors du dernier Conseil des Affaires générales du Conseil de l’Union européenne, actuellement sous la présidence belge. Par ailleurs, les États membres demandent un complément d’informations, en particulier deux rapports. Le premier, à charge des services juridiques du Conseil, doit apprécier si la modification proposée entre dans le cadre du droit communautaire. Le second, en cours de préparation au sein de la Commission européenne, doit étudier l’impact économique de son fonctionnement. Cela avait déjà été fait mais des précisions supplémentaires sont demandées par les États.
Pour en savoir plus, lisez cet article du journal en ligne Nació digital :
https://www.naciodigital.cat/noticia/267432/oficialitat-catala-europa-es-torna-a-ajornar
vous pouvez aussi écouter le nouvel épisode de la Tertulia proscrita du 25 janvier dernier « On és el perill per al futur del català » :
Ici: https://www.vilaweb.cat/podcast/tertulia-proscrita-futur-catala-perill/ ……….
Enfin, il ne nous faut oublier ni le « Catalangate » ni « l’Operació Catalunya », deux scénarios échafaudés sur la pratique de la guerre juridique (lawfare) contre l’indépendantisme, sur la base desquels ont été créées deux commissions d’enquête, ainsi d’ailleurs que la commission d’enquête sur les attentats d’août 2017 à Barcelone et à Cambrils. Bref, ces trois commissions
9Josep Cruanyes est avocat et historien. Il a été vice-président de l’ANC de 2018 à 2020. Il a été président de la Société catalane d’études juridiques et secrétaire de la Commission de la langue catalane du Conseil de l’Ordre des avocats de Catalogne et travaille depuis longtemps à la défense des droits linguistiques, motifs pour lesquels il a reçu en 2018 la Croix de Sant Jordi.
d’enquête10 portent sur la corruption, les mensonges, l’espionnage illégal, les faux témoignages… en définitive, sur des idées politiques qui ne sont pas celles défendues par une caste puissante profondément enracinée dans un franquisme rétrograde.
Pour en savoir plus, écoutez la vidéo « La ganiveta i Pegasus » de la plateforme Octuvre11 https://www.youtube.com/watch?v=qdp_zQQEIa4
Nous aurons l’occasion de développer ces affaires plus tard.
Si vous voulez participer, vous impliquer, si vous avez des idées de débats, d’actions, d’activités, de rencontres qui pourraient être organisés sur l’actuel territoire de l’État français, n’hésitez pas à nous contacter à l’adresse suivante : france@assemblea.cat
Nous vous rappelons aussi l’adresse de notre site Web : http://www.assemblea.fr
Merci infiniment pour votre soutien et votre engagement. Maintenant plus que jamais nous avons besoin de votre implication personnelle.
Vive la Catalogne libre !
L’équipe de coordination de l’ANC France
10 La création de ces trois commissions d’enquête fait partie des conditions du pacte pour l’investiture de Pedro Sánchez
11 Octuvre est une plateforme qui permet aux personnes intéressées de créer et de partager des contenus sur des thèmes que les grands médias n’expliquent pas.