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La Catalogne hésite sur la voie à suivre vers le vote d’autodétermination
Des partisans de l'indépendance de la Catalogne vis-à-vis de l'Espagne brandissent des drapeaux catalans et des pancartes lors d'un match de football opposant la Catalogne au Cap Vert au stade Lluis Companys Olympic de Barcelone, le 30 décembre 2013
Des partisans de l’indépendance de la Catalogne vis-à-vis de l’Espagne brandissent des drapeaux catalans et des pancartes lors d’un match de football opposant la Catalogne au Cap Vert au stade Lluis Companys Olympic de Barcelone, le 30 décembre 2013 (Photo Josep Lago. AFP)

 

Face au rejet ferme de Madrid, opposée à l’organisation d’un référendum sur son indépendance, la Catalogne hésite sur la façon de convoquer les citoyens aux urnes, soit lors d’une consultation non autorisée soit par le biais d’élections régionales.

Si le référendum ne peut être organisé, «nous devrions opter pour des élections et une déclaration unilatérale d’indépendance», lançait, lors d’une interview avec l’AFP, Carme Forcadell, présidente de l’Assemblée nationale catalane (ANC).

A l’origine des gigantesques manifestations indépendantistes organisées en Catalogne ces deux dernières années, ce puissant lobby citoyen porte désormais la voix d’un vaste secteur qui exige de pouvoir voter le 9 novembre sur l’indépendance de cette région du nord-est de l’Espagne.

«Le référendum doit être organisé. Nous ne pouvons pas et ne voulons pas reculer maintenant», insistait Conxita Parés, une femme âgée de 63 ans interrogée à Vic, principal fief indépendantiste de la région, le 8 avril.

Ce jour-là, le Congrès des députés, à Madrid, a rejeté à une large majorité la possibilité d’organiser un référendum d’autodétermination, les parlementaires arguant que la Constitution de 1978 consacre le caractère «indivisible» de l’Espagne.

«La volonté du peuple de Catalogne ne peut être bloquée par un vote du Congrès», avait réagi le président nationaliste de la région, Artur Mas.

– Vers une séparation unilatérale? –

La prochaine étape pourrait passer par l’adoption d’une loi au Parlement catalan qui permettrait d’organiser un vote non contraignant, sans l’accord de Madrid.

La viabilité de cette option semble toutefois limitée: Madrid tenterait de la bloquer car les régions espagnoles n’ont pas le droit d’organiser ce type de consultations si elles touchent une compétence propre à l’Etat central, comme cela pourrait être le cas d’une question affectant la souveraineté nationale.

Face à ces doutes, l’alternative qui revêt de plus en plus de force dans le secteur indépendantiste passe par convertir les prochaines élections régionales en un référendum de fait, les différents partis y affichant clairement leurs positions face à l’indépendance. Prévu pour 2016, ce scrutin pourrait être anticipé.

Mais dans ces deux cas, référendum ou élections, le doute demeure sur la marche à suivre au cas où les électeurs donneraient la victoire à la voie indépendantiste: chercher une solution en accord avec Madrid ou se séparer unilatéralement de l’Espagne?

Pour Josep Ramoneda, politologue, un «Oui» à l’indépendance dans les urnes «donnerait l’autorité suffisante (au gouvernement catalan, ndlr) pour exiger un geste du gouvernement» espagnol.

Mais il «pourrait (aussi) pousser certains partis et organisations sociales à faire pression sur Artur Mas pour qu’il déclare l’indépendance de façon unilatérale», ajoute Jordi Matas, professeur de sciences politiques à l’université de Barcelone.

Après deux années d’un bras de fer tendu, les appels au dialogue entre le chef du gouvernement conservateur espagnol, Mariano Rajoy, et Artur Mas, se multiplient.

«Le plus intelligent serait que le Parti populaire (de Mariano Rajoy, ndlr) encourage une réforme constitutionnelle et cherche un nouveau pacte qui permette de négocier avec la Catalogne», analyse Fernando Vallespin, professeur de sciences politiques à l’université Autonome de Madrid.

Il semble toutefois peu probable que le gouvernement catalan renonce au référendum.

N’ayant pas obtenu de majorité absolue lors des élections régionales de novembre 2012, Artur Mas a pu, pour se hisser au pouvoir, compter sur le soutien de la deuxième force régionale, les indépendantistes de gauche d’ERC. Mais à condition de s’engager à organiser le référendum d’ici 2014.

Abandonner ce projet reviendrait donc, pour Artur Mas, à assumer une défaite politique.

«La situation est très opaque. Il est difficile d’entrevoir une issue à court terme. Je crois que le dénouement dépendra de ce qu’il va se passer entre le 11 septembre (Jour de la Catalogne) et le 9 novembre», résumait Josep Ramoneda.

Les manifestations monstres organisées par l’ANC pour marquer les deux derniers 11 septembre avaient forcé Artur Mas à agir: en 2012, il s’était engagé à organiser un référendum et en 2013, il en avait fixé la date et choisi la question.

Pour cette année, l’ANC prépare une nouveau coup de force qui pourrait, encore une fois, accélérer le calendrier politique en Catalogne.

AFP

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