Història - Joan Villanove

Louis XIV et ses sujets.

1 – Lettre de Fénelon à Louis XIV :

(1651-1715)

« Votre peuple, Sire, que vous devriez aimer comme vos enfants, et qui vous a été toujours dévoué, est en train de mourir de faim. Plutôt que de le saigner à blanc, vous feriez mieux de le nourrir et de le chérir ; la France entière n’est plus qu’un grand hôpital désolé et sans provisions. Vos sujets croient que vous n’avez aucune pitié de leurs souffrances, que vous n’avez d’autre souci que le pouvoir et la gloire. »

2 – Que se passait-il donc dans le royaume de France ?

Un hiver rigoureux en 1692, et une mauvaise récolte l’année suivante provoquent une famine effroyable : entre un million et demi et deux millions de morts sur une vingtaine de millions d’habitants ! Soit plus de morts que pendant la première guerre mondiale dans les rangs français. Depuis son fastueux château de Versailles, Louis XIV tente de résoudre le problème en interdisant l’exportation de blé… Mesure dérisoire. Pire.

Louis XIV, étant toujours en guerre, doit augmenter les impôts : surtout la taille.
En 1695, il en invente un autre : la capitation qui restera en vigueur jusqu’en 1789.

A Paris, le lieutenant général de la police fait construire une trentaine de fours pour nourrir à bon marché les Parisiens affamés. On a décrit les cris, les disputes, les rixes… pour un bout de pain. Ne soyons pas étonnés si Charles Perrault écrit en 1697 l’horrible « histoire du Petit Poucet » et de ses sept frères, abandonnés dans la forêt par leurs parents désespérés.

Durant l’hiver 1709, plus de 300.000 personnes meurent encore de faim et de froid, un froid qui transforme rivières et champs en étendues de glace. Evidemment, il était facile d’admettre que tout cela était le résultat d’une fatalité sans solution. Mais les caisses vides empêchent Louis XIV d’acheter du blé chez les « répartiteurs qui avaient le monopole » en Egypte.

3 – Pendant ce temps, au château de Versailles, comment vivait-on ?

La cour compte quelques milliers de personnes, jusqu’à 10.000 courtisans qui s’entassent ; ajoutons 1.500 personnes occupées aux écuries pour entretenir près de 2.000 chevaux ; une odeur permanente de fumier virevolte dans le château. Savez-vous, par exemple, que parfois on amenait des vaches et des chèvres jusqu’aux appartements des princesses pour tirer le lait. La plupart des gens dorment dans des pièces miteuses. Pour masquer les effluves nauséabonds dans une hygiène douteuse, on distribue des parfums. Mais, un noble se sent très honoré de tenir la bougie lors du coucher du roi, un autre son pot de chambre, d’autres sont flattés d’assister à son réveil, c’est-à-dire une cinquantaine de personnes comblées par son invitation… d’autres ont été aux anges lorsqu’ils ont pu approcher le monarque après son opération de la fistule anale en 1686… Toujours plus : à sa guérison, Louis XIV exige qu’on chante des Te Deum dans les églises du royaume. Normal, puisque le roi était un thaumaturge, c’est-à-dire faiseur de miracles ; lors de certaines fêtes, il posait les mains sur des centaines de personnes pour les guérir en prononçant la formule magique : « Le roi te touche, Dieu te guérit. »

Bref, la noblesse est réduite à l’état d’animal de compagnie à la recherche de faveurs, de récompenses et de pensions. Voyons les comportements la noblesse catalane. A titre d’exemple, les seigneurs du Vallespir de Prats-de-Mollo (ville la plus importante après Perpignan) prêtaient serment de fidélité aux Comtes de Barcelone et rois d’Aragon ; voici le texte qu’ils lisaient :

« nous sommes chacun autant que toi, nous te saluons comme roi à la condition que tu maintiennes nos droits et nos libertés et sinon, non ! »

Autre détail : je vous rappelle que les consuls des grandes villes catalanes avaient instauré le Privilège de Couverture : ils restaient la tête couverte devant le souverain ! Vous imaginez cela à Versailles ? A Versailles, la vie quotidienne était pesante avec son étiquette, ses rituels, son manque total de confort, ses commérages, ses intrigues puériles, ses jeux, la chasse, et le lancement cynique de rumeurs : ainsi était la Cour. Ce système sera conservé sous les Empires et même sous les républiques ; savoir courtiser pour un poste de ministre ou de secrétaire d’Etat est tout un art. Louis XIV fit construire des palais pour ses maîtresses et il dépensa sans compter. Dommage que les émissions populaires télévisées ne se penchent que sur le bâtiment pompeux du château de Versailles.

Le cortège fastueux du roi, de ses courtisanes et courtisans,
se déplace de château en château indifférent à la misère du peuple

Tout doit être militairement ordonné : même la nature est codifiée. C’est ainsi que Le Nôtre, fidèle à la pensée parisienne, dessine des jardins géométriques. La géométrie ? Voilà ce qui plait à l’esprit parisien. Quelle différence avec le jardin à l’anglaise et le jardin à la catalane ; on aperçoit que ces deux nations – Angleterre et Catalogne étant gouvernées sous une monarchie constitutionnelle – ont la même vision pour l’aménagement des jardins. En fait, discipline d’un côté, souplesse de l’autre. Organisation uniforme d’un côté, équilibre des volumes de l’autre. Rigidité immuable du plan en toutes saisons comparé à l’enchantement de mille couleurs en automne. Difficile de concilier des visions aussi opposées. Plus tard, nous retrouverons cette géométrie dans le découpage du territoire de la République en départements tous uniformes et en 1806 dans le plan de la place de l’Etoile ; ce que les Parisiens nomment « la plus belle avenue du monde » n’est qu’une figure géométrique portant les noms de militaires qui ont ravagé les pays d’Europe ; les douze avenues convergent vers le Dieu vivant qui a imaginé la place : Napoléon. Enfin, notons que la France s’est baptisée elle-même d’un nom issu du vocabulaire de la géométrie : hexagone.

Jardin à la « française »
Place à la « française »
Jardin à « l’anglaise »
Jardin à la « catalane »

4 – Toujours plus….

L’histoire officielle explique que si le Roi Soleil avait rassemblé à Versailles les nobles, c’était pour les empêcher de se révolter contre lui ; car, le danger vient de ces nobles toujours prêts à ferrailler sans raison. Or, la réalité est tout autre. Ce que l’on appelle communément les « provinces » vivaient pour la plupart avec leurs coutumes et leurs langues ; souvent, malgré l’Intendant, elles pouvaient avoir un petit parlement de conseillers qui fonctionnait plus ou moins bien pour régler la vie locale. Il y avait des problèmes d’ambition entre quelques personnes, mais les conflits n’allaient pas très loin.

En France, Louis XIV disposait d’une armée jusqu’à deux cent mille hommes… non pour se défendre, mais pour s’emparer des terres de ses voisins au nord, à l’est, au sud. Et dès que le territoire était conquis, il envoyait Vauban pour fortifier et interdire ainsi à cette région de retourner à la « maison mère originelle » : soit une trentaine de villes ainsi fortifiées. Louis XIV a poursuivi l’objectif de ses prédécesseurs : soumettre par les armes les régions appartenant aux pays voisins ; pour ces rois de France, il ne peut y avoir qu’un seul pouvoir : celui du roi, relayé par un intendant qui peu à peu coiffera tous les pouvoirs. Au total, Louis XIV a guerroyé pendant 33 ans, sur 54 ans de règne.

Or, lorsque nous regardons les pays voisins, certes ce n’était pas parfait, mais les provinces avaient des libertés et des chartes ; tradition fédéraliste des Pays de culture germanique avec ses Principautés (Bavière, Saxe…), de culture anglo-saxonne (Angleterre, Pays de Galles, Ecosse plus tard en 1707), de culture catalane (Catalogne, Aragon, València dès le départ au XII°) et l’ensemble des petites communautés dans la péninsule italienne… exactement tout ce que le roi de France détestait viscéralement, étant pathologiquement obsédé par un absolutisme total. Autrefois, la plupart des nobles se sentaient responsables de leurs « provinces ». Dès qu’ils furent soumis par les armées françaises, Louis XIV les amena à Versailles et les transforma en dociles chiots. Quelle décadence !

La noblesse catalane de la Province du Roussillon est l’une des rares à avoir « tenu le coup » face aux Sirènes de Versailles ; moins d’un siècle plus tard, juste avant la Révolution, le Cahier de Doléances de la Noblesse du Roussillon est explicite, elle se sent responsable et elle l’écrit :

«…les députés s’occuperont de la province et feront valoir les droits avec tout le zèle… ils se joindront aux députés des autres ordres, et notamment du Tiers-Etat de la province pour obtenir l’abolition générale des cotes privilégiées de capitation dont le fardeau retombe à plomb sur la partie la plus indigente des citoyens… »

[Je vous rappelle que c’est Louis XIV qui avait instauré la capitation en 1695]. La noblesse demande de reconsidérer le prix du sel, la gabelle ayant été supprimée en Pays Catalan en 1283 :

«…le prix du sel a été porté à un taux excessif, qu’il en est résulté un dommage évident pour l’agriculture et un nouveau genre de fraude inconnue dans cette province».

Quant aux recettes de l’Etat,

«l’ordre de la Noblesse doit supporter, impôts et contributions…»

; et elle demande

« a rectification des droits de douanes qui gênent le commerce».

Enfin, elle précise dans l’article 3 :

«il est établi des états particuliers dans chaque province»

[dans l’esprit fédéraliste c’est un statut particulier par province] ; article 7 :

«les lettres de cachet sont abolies»

article 10 :

«la liberté de la presse est proclamée»

Telles étaient les vraies missions de la noblesse. Fonctions mises sous l’éteignoir par Louis XIV.

5 – La rapacité des rois de France ? Un modèle pour Louis XIV.

Lyon et sa région faisaient partie de l’Empire Germanique depuis 1032, au sein d’une organisation fédéraliste, qui accordait de larges autonomies. C’est l’archevêque de Lyon qui gérait la ville et sa contrée, disons le « comté ». D’ailleurs l’empereur, dans une bulle, avait accordé les pouvoirs à l’archevêque, secondé par des laïcs : organisation d’équilibriste, mais pragmatique. Le pape donna une importance à Lyon, puisqu’il séjourna dans la ville plusieurs fois au XIII° et au XIV° siècles. Comme partout en Europe, les bourgeois souhaitaient une Charte Communale. Or, à cette époque, au XIII° siècle, la Croisade des Albigeois – contre les Cathares – prenait fin ; jusqu’à cette date les comtes de Toulouse prêtaient serment de fidélité au roi de France : maintenant ces nouveaux territoires font partie du domaine royal. Le roi a directement la main mise sur le comté de Toulouse et le Languedoc, c’est-à-dire qu’il prend tous les pouvoirs par l’intermédiaire de ses intendants : la culture occitane s’évanouit et sonne la disparition des troubadours.

Les bourgeois de Lyon espèrent obtenir une Charte communale et ils se tournent vers le comte de Savoie, de l’Empire Germanique, c’est-à-dire leur autorité juridique depuis des siècles. C’est à ce moment que le roi de France entre en jeu… bien que le lyonnais soit situé dans un pays étranger. Les rois de France se demandent : après Toulouse, pourquoi ne pas s’emparer de Lyon ? Peu à peu, la confusion, pilotée par le fils du roi de France, commence à gangrener le Lyonnais. Après 60 années de menaces, d’emprisonnement, d’incendies, de pillages, de pendaisons (songez qu’une seule bataille près d’un cloître a fait plus de cent morts) ; Philippe le Bel, roi de France, prend entièrement les rennes du Lyonnais en 1320 et il permet d’instaurer une Charte communale. L’archevêque avait perdu toute « autonomie » accordée par l’Empire Germanique. Cet Empire devait-il faire la guerre à Philippe le Bel pour défendre son territoire ?

Les arguments du roi de France…
Blason de l’archevêque de Lyon, avec la Croix de la Savoie.
La fleur de lys de France sur fond bleu est ajoutée dès la conquête.

Rappelons que Perpignan avait obtenu sa charte communale en février 1197 sans aucune violence.

6 – Avant Louis XIV, les armées françaises chassaient en « Italie ».

La péninsule italienne – qui n’était pas un pays unifié et centralisé comme aujourd’hui – comptait des royaumes, des duchés, des comtés et des villes républiques libres. Cette diversité, qualifiée d’anarchique par certains « esprits parisiens », a enfanté des centaines d’artistes prodigieux et fantastiques pour certains : tout le génie prolifique de la Renaissance, que nous admirons encore aujourd’hui, nous le devons à ces « petits pays » et à ces « petites communautés » : architectes, peintres, sculpteurs, musiciens, écrivains, etc. Certes, il y avait des ambitions personnelles, mais les guéguerres, comme chez les Médicis, étaient locales.

Quelle a été l’attitude des rois de France face à ces nombreuses nations qui espéraient vivre en paix ? Un mot d’ordre : les rapports de forces, c’est-à-dire guerres, pillages, vols, le tout ramené en France.

Voyons les campagnes militaires lancées en « Italie » sous les règnes de Charles VIII, de Louis XII, de François Ier et d’Henri II.
  • Sous Charles VIII : première campagne militaire de 1494-1497 ; son armée compte 36.000 hommes nourris sur place (16.000 cavaliers, 20.000 fantassins dont 10.000 mercenaires suisses et allemands) et une puissante artillerie.
  • Sous Louis XII : deuxième campagne militaire de 1499-1500 ; troisième campagne 1501-1504 ; il s’empare du Milanais, mais une seule ville résiste, les habitants sont tous massacrés ; le roi subit un désastre à Garigliano en 1503 et il se retire ; puis il reprend les armes pour la quatrième campagne de 1508-1513 ; les ressources (c’est-à-dire les vols) tirées de l’« Italie » lui permettent de diminuer les impôts en France ; quelle aubaine ! Récompense suprême : Louis XII porte le surnom de « père du peuple ».
  • Sous François I° : cinquième campagne militaire ; il est couronné en janvier 1515 et, à la tête de 15.000 hommes, il se lance dans une campagne et remporte la victoire de Marignan en septembre 1515 (toujours en « Italie ») ; il poursuit avec la sixième campagne militaire de 1521-1526 ; il continue avec la septième campagne militaire de 1526-1529 ; puis la huitième campagne militaire de 1535-1538 ; puis la neuvième campagne militaire de 1542-1546 ; le roi meurt en 1547. Dans une récente émission télévisée (Secrets d’histoire), François I° a été qualifié de « Roi des Rois » et « amoureux de la Renaissance italienne »… Qui aime bien châtie bien !
  • Son fils Henri II, avec 50.000 hommes, entame la dixième campagne militaire 1552-1556 ; puis la onzième campagne militaire de 1557 à 1559.

Peut-on imaginer les massacres, les souffrances, la misère, les vols et les ruines qui se sont abattus sur les populations qui devaient supporter l’insatiable rapacité des rois de France ?

 

Venons-en à Louis XIV ? Il reprend l’habitude de ses prédécesseurs : la guerre. A cette époque, le royaume compte vingt millions d’habitants. L’empire germanique dix millions, l’Espagne huit, l’Angleterre cinq. L’armée française est composée de 150.000 hommes, parfois 200.000 avec de nombreux mercenaires suisses ou allemands ; c’est la plus puissante d’Europe. Rappelons que l’Empire germanique est un vaste ensemble de Principautés vivant sous un régime fédéraliste, c’est-à-dire non-centralisé ; il n’est pas organisé pour lever une armée générale qui regrouperait les forces unies des Principautés; son empereur est élu. En septembre 1688, l’armée française pénètre sans déclaration de guerre formelle sur les hauteurs dominant le Palatinat (rive droite du Rhin), puis sur la rive gauche. On pourrait penser que pendant les guerres, les armées ne faisaient que passer en se déplaçant selon les tactiques des commandants en chef ; elles pouvaient aussi stationner quelque temps au même endroit. Alors, tout était permis ; le « droit de la guerre » effaçait le « droit des gens » : destruction de l’outil de travail des paysans et des artisans, pillage des ressources alimentaires, vol des stocks de foin et de paille pour les milliers de chevaux de la cavalerie d’occupation, incendies des églises où se réfugiaient les populations, maisons des particuliers fouillées pièce par pièce par le soldat et, ultime récompense, les viols occasionnels, etc. ; le soldat français fut surnommé «schnapphahn», c’est-à-dire le maraudeur.

Dès lors, les populations germaniques exaspérées harcelèrent les troupes françaises. Le général Turenne prit alors une décision incroyable : il donna l’ordre de ravager le Palatinat, grande et riche région sur la rive droite du Rhin. Folie destructrice ! Rappelons que la région du Palatinat couvre une grande superficie, il ne s’agit donc pas de quelques villages. Fini l’épisode des petits vols personnels, maintenant l’armée avait l’autorisation de tout raser. Un officier écrivit à Louvois, ministre de la guerre :

«dans les deux dernières semaines, j’ai brûlé treize villes et villages… il ne restait plus âme qui vive dans aucun d’eux».

Sous le maréchal Turenne, les incendies et les atrocités se multiplièrent entre le Rhin et le Neckar : des villages, des temples, des églises disparurent. 

Dans toute l’Europe, et surtout dans les principautés allemandes qui composaient le Saint Empire Germanique, ce ne fut qu’un cri d’horreur et de douleur. Face à la baisse alarmante de la population, Louis XIV publia un édit pour encourager les catholiques (uniquement) à repeupler la région. Voici le bilan partiel des méfaits de Louis XIV, de Louvois et du « génial » Vauban. Plus tard, toujours sous les ordres de Louvois, Turenne lancera un deuxième pillage du Palatinat : destruction des cultures, massacres à la chaîne, vol du bétail, démolition des fortifications… Voltaire a écrit concernant le Palatinat :

C’était pour la seconde fois que ce beau pays était désolé sous Louis XIV
mais les flammes dont Turenne avait brûlé deux villes et vingt villages n’étaient que des étincelles, en comparaison de ce dernier incendie.
L’Europe en eut horreur
Château d’Heidelberg : façade volontairement laissée dans l’état
Spire : la magnifique et vaste cathédrale
du XI° siècle, avec une tour carrée à
chaque angle (où reposaient des empereurs
germaniques) s’écroula sous les flammes
Heidelberg, porte reconstruite

L’historien contemporain Jean Bérenger nous livre son opinion :

« ce ravage féroce du Palatinat sera un lourd contentieux franco-allemand qui ne sera réglé qu’avec la construction européenne, après la Seconde Guerre mondiale. »

PS -> Rappelons que le petit-fils de Louis XIV sera couronné roi d’Espagne sous le nom de Philippe V… Voilà qui promet !

7 – Pendant ce temps, que se passe-t-il ailleurs ?

Les autres pays avaient investi dans la marine. Ils s’étaient lancés à la découverte du monde et à l’exploration des nouveaux continents. Ils avaient consolidé des relations grâce à un réseau de « comptoirs commerciaux » avec les pays d’Amérique et d’Asie. Au XVII° siècle, la marine hollandaise dépasse le potentiel de tous les pays de l’Europe : 6.000 navires et des milliers d’hommes d’équipage ; que ce soit pour la pêche, la navigation lointaine, la guerre navale, la Hollande est au-dessus. Les Hollandais avaient conçu la Flûte ; c’est un type de navire marchand de 30 à 40 mètres de long, performant, économique à construire et capable d’être manœuvré avec un tiers de marins en moins que les autres bâtiments de même tonnage. Dans les années 1600, la flotte hollandaise contrôle le commerce extérieur des ports français de l’Atlantique. La France est très loin derrière… mais elle a les châteaux. Richelieu prend conscience du retard dramatique et en 1626, il commande la construction de dix-huit vaisseaux et six l’année suivante ; mais il n’y a pas d’arsenaux de construction en France ; la commande est passée à la Hollande et à la Suède. Pendant que les rois de France, amoureux de la Renaissance, s’activaient avec férocité en « Italie », certains pays sillonnaient les mers et se projetaient dans l’avenir…

  • Bartholomeu Dias, au service du Portugal, découvre le cap de Bonne Espérance en 1488.
  • Christophe Colomb, au service de la Castille, « découvre » l’Amérique en 1492.
  • Jean Cabot, au service de l’Angleterre, aborde le Labrador en 1497.
  • Vasco de Gama, au service de Venise, découvre le sous-continent indien en contournant le cap de Bonne Espérance d’ouest en est en 1497.
  • Pedro Cabral, au service du Portugal, aborde le Brésil en 1500.
  • Diogo Dias, au service du Portugal, découvre Madagascar en 1500.
  • Amerigo Vespucci, au service de Florence, débarque en Amérique du sud en 1501.
  • Antonio Habreu, au service du Portugal, découvre la Nouvelle-Guinée en 1511.
  • Vasco Balboa, au service de la Castille, traverse l’isthme de Panama en 1513 ; il aperçoit un vaste océan que Magellan baptisera Pacifique huit ans plus tard,
  • Magellan, au service du Portugal, réalise le premier tour du monde, le départ en 1519.
Le château de Chambord
Navire marchand hollandais

Dans la course à la découverte du monde,

beaucoup de places commerciales sont déjà prises.

La France paye sa double illusion:

l’exhibition fastueuse de châteaux et sa tradition séculaire de la guerre.